Un être cher s'est suicidé et mon enfant est en deuil : Pistes pour accompagner les enfants en deuil à la suite d'un suicide
Il peut être difficile de saisir ce qu’il y a dans la tête d’un enfant qui vient de perdre un proche à la suite d’un suicide.
Le deuil vécu par l’enfant est différent de celui vécu par l’adulte. Les enfants n’ont pas l’expérience des adultes et ils s’expriment davantage par l’action que par les mots. Aussi, ils ont la capacité d’entrecouper leur souffrance par des périodes de jeux, ce qui peut laisser croire qu’ils n’ont pas de chagrin.
Mots d'enfants
« Pourquoi est-il parti s’il m’aimait? »
« J’aurais dû être plus gentil. »
« J’ai peur que maman attrape aussi le suicide. »
« Je m’ennuie. Quand reviendra-t-elle? »
« Si je n’étais pas allé jouer avec mes amis, j’aurais pu l’empêcher de faire ça. » « Je dois être fort, car maman a beaucoup de peine. »
« Mon frère s’est suicidé : c’est un lâche. »
« C’est à cause de madame Unetelle que mon père s’est suicidé. »
Avis : Ces informations ne remplacent pas les services d’un professionnel. Il ne faut pas hésiter à consulter une ressource d’aide au besoin.
Est-ce que les réactions de mon enfants sont normales
Chaque enfant est unique. Sa compréhension de la situation et ses réactions sont liées à son âge et varient d’un enfant à l’autre. Certaines réactions peuvent s’installer, disparaître, puis revenir comme une vague et évoluer au cours du développement de l’enfant.
Voici les réactions les plus communes
L’enfant pleure plus que d’habitude.
L’enfant ne pleure pas, il semble ne pas avoir d’émotions.
L’enfant est renfermé.
L’enfant est agressif.
L’enfant joue à la mort avec ses jouets, avec ses amis, sur ses dessins.
L’enfant s’agrippe à un adulte : veut le suivre, savoir ce qu’il dit aux autres, savoir où il va, dormir avec lui.
L’enfant fait pipi au lit.
L’enfant réagit en « bébé », en plus jeune, comme s’il régressait.
L’enfant a mal au ventre, au cœur.
L’enfant a des problèmes de sommeil : il fait des rêves, des cauchemars, il a peur de s’endormir.
L’enfant a de la difficulté à être seul ou à être en groupe. • L’enfant vit des difficultés scolaires.
L’enfant est turbulent à la garderie ou à l’école.
Toutes ces réactions sont normales. Il faut être attentif aux réactions qui s'intensifients.
Être rassuré sur l’expression de ses émotions comme la peine, la colère, les peurs : « C’est normal que tu te sentes comme ça, mais tu verras, ça ne sera pas tout le temps aussi difficile. » Nous devons bien faire comprendre à l’enfant que ces sentiments s’estomperont graduellement. Il a besoin que nous lui transmettions de l’espoir.
Entendre parler de son proche décédé. Cette personne était probablement un modèle pour l’enfant. Il faut continuer d’en parler.
Respecter la routine de l’enfant dans la mesure du possible. Malgré la situation, il peut poursuivre ses activités régulières (école, cours de natation, soccer, heures et rituel du coucher, etc.). L’enfant peut prendre congé de sa peine.
Lors d’un deuil, les agissements et les points de vue exprimés par les parents face à la mort influencent les réactions de leur enfant et la façon dont il voit l’événement. Ce qu’ils expriment compte beaucoup pour l’enfant.
Lorsque le parent est lui-même endeuillé et bouleversé, il devient parfois difficile pour lui d’accompagner son enfant. Cependant, la plupart des parents sont en mesure d’accompagner et de soutenir leur enfant, en dépit de leurs propres émotions comme la peine, la colère, etc.
Oui, nous pouvons pleurer avec son enfant, mais nous devons aussi le rassurer : « Papa pleure, mais tu verras, nous allons nous en sortir! »
En cas de besoin, une personne peut être désignée pour accompagner l’enfant. Tout adulte entourant un enfant endeuillé peut faire une différence. Ce soutien peut aussi être professionnel. Nous devons consulter sans hésitation… Mais comment y préparer l’enfant?
Voici une analogie qui peut dédramatiser le fait de consulter : « Si tu tombes en bicyclette et que tes mains saignent, je vais nettoyer tes bobos, les désinfecter et poser un pansement… Ce sera suffisant. »
Si, par contre, ton bras s’est cassé quand tu es tombé de ta bicyclette, j’aurai besoin de l’aide du médecin pour te soigner comme il faut et réparer ton bras. »
« Ton cœur a une blessure et j’ai besoin de l’aide d’une personne dont le métier est d’aider à soulager la peine et la douleur « dans le cœur » des enfants. Cette personne pourra t’aider à trouver des solutions. »
Aborder le sujet de la mort et du suicide en utilisant des mots adaptés à l’âge et au développement de l’enfant.
Donner des réponses courtes et simples. Attendre que l’enfant pose de lui-même d’autres questions. Ne pas fournir à l’enfant plus de renseignements qu’il en demande.
Il est préférable que l’enfant apprenne la vérité par le parent plutôt que par un étranger ou dans la cour d’école.
Donner des explications claires, simples et concises sur les causes réelles du décès lorsque l’enfant veut en savoir davantage.
Départager les détails utiles à la compréhension de ceux qui sont morbides. Il est important de laisser le moins possible place à l’imagination fertile des enfants.
Insister sur le fait que ce n’est pas de la faute de l’enfant ni celle de personne d’autre. « Le suicide, c’est quand une personne est tellement triste qu’elle décide de ne plus faire fonctionner son corps. C’est le genre de tristesse que nous ressentons pendant longtemps et qui rend très malheureux. »
Distinguer le fait que la personne qui est décédée par suicide est une bonne personne, mais que c’est le moyen qu’elle a utilisé pour solutionner son problème qui n’est pas le bon.
L’enfant peut, au fil de son développement, reposer les mêmes questions, mais de façon plus élaborée. Il peut revenir à la charge. Il a besoin d’une réponse plus complète, plus nuancée. Il faut reprendre nos explications, redonner des exemples. Prendre le temps de répondre.
Les rituels sont aidants pour les enfants et pour les adultes. Il faut cependant y préparer l’enfant en lui expliquant ce qu’il va voir et entendre. Il est adéquat de le laisser décider comment et quand il veut participer à ces rites. Par exemple, l’enfant peut participer au choix des chansons ou d’un souvenir à déposer dans le cercueil. Permettre à l’enfant d’être impliqué lui procure le sentiment d’être digne de confiance et respecté, non pas exclu. Le deuil est plus facile à vivre pour l’enfant qui a un parent qui comprend sa douleur et qui l’accompagne dans les différentes phases. Selon les recherches, la vue du corps, si pénible soit-elle, facilite la progression du deuil.
Si le corps est intact de blessures apparentes, il est conseillé que l’enfant voit le corps du défunt. Au salon funéraire, il est suggéré d’arriver plus tôt pour laisser de l’espace à l’enfant. La durée de sa présence varie selon l’âge, la personnalité et les réactions de l’enfant. La vigilance et le bon discernement de l’adulte désigné pour l’accompagner permettront de mesurer la durée de la présence de l’enfant au salon funéraire ou aux funérailles.
Le deuil est plus facile à vivre pour l’enfant qui a un parent qui comprend sa douleur et qui l’accompagne dans les différentes phases.
Voici quelques exemple de gestes que l'enfant et sa famille peuvent poser au salon funéraire :
Glisser une lettre ou un cadeau dans le cercueil;
Lire une des compositions de l’enfant;
Apporter des objets significatifs;
Exposer les dessins de l’enfant;
Écouter de la musique et chanter.
À la maison :
Faire un montage-photo;
Cuisiner ou partager un repas commémoratif;
Trouver un caillou ou un élément de la nature symbolisant le défunt;
Allumer une bougie;
Lire un poème ou, selon les croyances religieuses, faire une prière.
Besoin d'aide
Comment aider mon enfant si je me sens dépassé? Qui pourrait me guider?
Les enfants endeuillés ont des forces et des capacités, il faut les reconnaître. Ils ne sont pas uniquement des personnes endeuillées. Ils pourront vivre encore des moments de bonheur.
Pour toute aide ou information supplémentaire, n’hésitez pas à joindre votre CLSC ou toute autre ressource de votre milieu offrant des services d’aide aux enfants endeuillés.
Documents de référence : Jacques, J., (2005), Un baume pour le cœur, brochure conçue par la corporation des thanatologues du Québec. C.A.M.H., (2004), When a parent dies by suicide... What kids want to know, brochure conçue par le Centre for Addiction and Mental Health. Gallagher, R., (2005), Le problème du suicide chez les enfants... Comprendre et agir à l’école primaire, brochure conçue par la Direction de santé publique de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine.